Lahangi Korwa 1998 ink on paper 56x71 cm
L'histoire des ces dessins est singulière. Afin d'étudier les diverses communautés tribales du Madya Pradesh, parmi les plus nombreuses et variées de l'Inde –l'Etat du Madya Pradesh fait la taille de la France-, Swaminathan envoie des émissaires, ethnologue, peintres et poètes pour la première fois en 1983 (il y aura plusieurs expéditions). Arrivés chez les Hill Korwa, après plusieurs heures de routes et de pistes, ils commencent à prendre des notes, à faire des croquis. A leur grande surprise, les villageois s'emparent de leurs feuilles de papier, de leurs stylos, crayons et marker et se mettent spontanément à dessiner.
Là où les membres d'autres tribus tracent le plus souvent des formes figuratives mi humaines mi animales, les Korwa couchent sur le papier des rythmes calligraphiques, un alphabet inconnu, parfois surligné de traits ou accompagné d'arcs et de flèches. Les Korwa parlent un dialecte sans écriture. Il faut croire que la rencontre, lors de leurs déplacements dans les villes avoisinantes, avec la chose écrite a été des plus éblouissantes.
Korwa 1998 ink on paper 56x71 cm
Conféraient ils à l'écriture un rôle magique, amenait elle aux personnes la maîtrisant un pouvoir inconnu ? Percevaient ils l'écriture comme une manifestation artistique propre à exprimer la sensibilité et à transmettre les traditions ? Voulaient ils simplement participer à cet étrange rituel au quel semblait les convier ces visiteurs ? Les interprétations de ces apparentes écritures sont multiples. "Quand ils écrivent, je crois bien qu'ils prennent leur crayon pour un arc. Ils n'écrivent pas, en fait : ils tirent. Ils tirent des signes qui sont des flèches." rapporte Archana dans le livre de Frank André Jamme publié en 1996 par la Galerie du Jour. "Ou encore il s'agirait d'une sorte de transe. Au lieu de crier, de chanter, de gesticuler et de danser, comme tout bon chamane, nos Korwa, simplement, écriraient." écrit FA Jamme dans l'une de ses approches du mystère Korwa.
On reste impressionné par l'aisance de ces Korwa, hommes et femmes. L'élégance du geste, la science du plein et du vide dans leurs compositions, évoquent celles d'artistes aguerris. On pense à Michaux, Cy Twombly…
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